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Au rayon cd
9 septembre 2012

EIFFEL, Foule Monstre : album de la rentrée (au moins) !

 

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Avant d'écrire cette chronique sur Foule Monstre, j'ai eu envie de réécouter toute la discographie de Eiffel, comme si Claire Chazal venait d'annoncer la disparition du groupe bordelais dans des circonstances floues.

Oui, si Eiffel disparaissait aujourd'hui dans des circonstances troubles (comme le chanteur de Killing Joke cet été), il en serait fait mention dans le journal de 20 Heures de TF1 et Les Grosses Têtes diffuseraient "A tout moment la rue" (sauf si Johnny, l'artiste RTL, disparaissait en même temps). Que de chemin parcouru en dix ans !

Eiffel est l'un des seuls espoirs de la musique en France, au sens où il existe par son seul talent musical et non par filiation familiale ou promotion canapé. Espoir donc pour les amateurs de musique et les musiciens qui ont une âme et du talent au pays du piston des bébés rockers et des bobos rockers. Eiffel s'est fait une place sans même avoir cédé au créneau bonnard du "rock engagé" (comprendre "rock normal" : sans grâce, sans charisme, engagé dans les subventions). L'authenticité et la sincérité payent aussi parfois, quand ils ne sont pas des arguments marketing mais les véhicules d'un talent musical sans failles. Le combo bordelais en est la preuve éclatante.

Avant même de jeter une oreille sur Foule Monstre, je me dis que tout ce que les quatre musiciens peuvent sortir maintenant n'est finalement que du bonus : ils ont déjà leur "Avec le temps" à eux ("J'ai poussé trop vite"), leur "Ne me quitte pas" ("Sombre"), leur Citizen Kane ("Tu vois loin"), leur Joconde ("Qu'ai-je donc à donner "), leur Voyage au bout de la nuit ("Sous ton aile"), leur Pyramide du Louvre ("Tes vanités"), leur Venus de Milo ("Hype"), leur étoile au Hollywood Boulevard du rock crépusculaire en rémission. Tout un trésor qui n'aura de cesse d'être découvert et redécouvert avec le temps.

En guise de bonus donc, Eiffel publie aujourd'hui un album parfait aux 3/4 (quasi parfait pour le reste) - mélodieux et évident, poétique et magnifiquement produit -, contenant trois singles potentiels dans sa première moitié (en plus du premier, "Place de mon cœur") : "Libre", gros gros tube dance en puissance qui pourrait bien propulser Eiffel sur les dancefloors, "Foule Monstre", un bœuf au paradis entre Bashung, Gainsbourg et Lennon, "Le même train", bulldozer FM rock que n'auraient pas reniés les années 80, une époque où fulgurance et arrangements n'étaient pas considérés comme des gros mots dans la création musicale française. Vertige de l'amour de la musique, le retour. Foule Monstre regorge de chansons populaires, au sens noble du terme.

L'entité "groupe" Eiffel n'a pas de concurrence en France, il joue seul en Ligue 1, avec deux-trois remplaçants pas à la hauteur sur le banc de touche. Tous les autres évoluent en division du déshonneur.

Eiffel, groupe engagé ? Dieu nous en préserve. Les donneurs de leçon finissent toujours au rebut de l'histoire, sans passer par la case Bastille. L'étiquette "engagé" - vide de sens - est un raccourci journalistique (pléonasme) bien pratique pour s'affranchir de l'effort d'une qualité d'écoute permettant de déceler la singularité d'un groupe. La singularité de Eiffel réside dans sa poésie de haut vol et son âme haut perchée au-dessus de la foule faussement sentimentale, d'une mêlée "qui devient un nouvel « humanitarisme » écolo-éthique, où l’indifférence est généralisée sous couvert de « l’amitié entre les hommes »", pour reprendre les termes de Dantec.

En 2012, Eiffel incarne à sa façon une résistance contre l'aliénation ambiante, par la seule constance de son talent (discrimination ultra positive). Avant, il y avait du Thiéfaine, du Noir Désir, du Ferré, du Pixies, du Lennon/McCartney, du Romy Schneider dans Eiffel. Aujourd'hui, il y a du Gorillaz, du Balavoine ("Libre"), du Shaka Ponk et toujours de l'excellent Eiffel. Tant qu'il n'y a pas du Izia et autres représentants du toc français, le rock français en France - au sens où il s'exprime dans la langue de Molière et de Rimbaud - a encore de beaux jours devant lui.

Bref, laissez-vous emporter par Foule Monstre.

 

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